Le dernier mois de l’année est toujours consacré aux tops culturels, c’est la règle. Retour sur mes films et mes albums préférés.
Mes films préférés de 2025
10. Sirāt d’Oliver Laxe

Parfois, les films qu’on aime ne se mesurent pas au plaisir que l’on ressent en les regardant mais au choc qu’ils produisent… Et les films d’horreur ne sont pas toujours ceux que l’on croit. Sirāt, grande secousse du Festival de Cannes de cette année, a clairement été une déflagration d’une rare intensité dans ma vie de spectatrice, et que je place sur le même plan que mes autres grands traumatismes cinématographiques (Requiem For A Dream, Mother! et Hérédité). Outre son côté choc très réussi et déroutant (littéralement…), j’ai aussi adoré son rythme indolent, son fil narratif décousu, ses motifs de road-trip hypnotiques aux allures de mirages. C’était une vraie réflexion audacieuse et oserais-je le dire, homérique, sur ce que peut être l’enfer sur Terre (dans mon cas : être forcée de revoir ce film. Je ne le reverrai jamais. Laissez-moi tranquille).
9. Valeur Sentimentale de Joachim Trier

J’ai détesté le dernier film de Joachim Trier et j’adore rappeler pourquoi point par point (vous pouvez lire ma critique ici), mais malgré notre beef, j’ai été agréablement surprise par son nouvel opus. Premier coup de cœur : la grande maison familiale en bois rouge, filmée avec amour et méticulosité, et ses beaux intérieurs au design norvégien… Second coup de cœur : la performance ultra-juste du trio Renate Reinsve-Stellan Skarsgard-Inga Ibsdotter Lilleaas, qui incarne avec brio une famille estropiée et dysfonctionnelle. Joachim Trier verbalise peu de choses sur les relations pères-filles, mais tout est dans les regards, les sourires et les espoirs déçus… et ça m’a un peu bouleversée.
8. Sorry, Baby d’Eva Victor

Petit favori du cinéma indie et féministe, Sorry, Baby m’a conquise dès sa première image aussi feutrée qu’intriguante : celle d’une grande maison dont les chaudes lumières intérieures se découpent nettement sur la nuit noire de l’hiver. Avec trois fois rien, Eva Victor allume de petits incendies dans nos ventres et dans nos vies, en dispersant ça et là des bribes d’interrogation fertiles (et que j’ai hâte qu’iel déploie dans ses prochains films) : comment entretenir l’amitié à l’âge adulte ? Comment se réapproprier son corps et son désir après une agression ? Comment survivre au traumatisme ? Mention aussi pour ses allusions malines à la non-binarité et au rôle que les animaux peuvent jouer dans notre guérison.
7. Renoir de Chie Hayakawa

C’était un de mes coups de cœur du Festival de Cannes et je trouve qu’il a trop peu été célébré ! Renoir réunit tout ce que j’aime à l’écran : un film à hauteur d’enfant, une héroïne futée et en même temps encore très naïve, des images douces et solaires. Réflexion bien plus terrassante qu’elle n’y paraît sur le deuil et la famille, c’est un film qui m’a surpris par sa mélancolie, et qui m’a donné l’impression de toujours marcher au bord d’un précipice : est-ce qu’on va tomber dedans et souffrir le martyre, ou est-ce qu’on va réussir à rester en équilibre sur cette corde raide ? A vous d’en juger.
6. Les enfants vont bien de Nathan Ambrosioni

Découverte tardive et imprévue, le film de Nathan Ambrosio m’a touchée en plein cœur parce qu’il se trouve à la frontière de plein de choses intéressantes. D’abord, il joue allègrement avec les genres cinématographiques : est-ce un thriller, un film d’enquête ou un drame familial ? Les fantômes existent-ils ? Le suspens plane jusqu’au bout, et puis le réalisateur nous emmène ailleurs, dans des contrées encore trop peu explorées sur grand écran, comme les ruptures lesbiennes, les mères qui renoncent et l’apprentissage de la parentalité quand les enfants sont déjà grands. C’est un film qui cache son côté dévastateur dans un rythme faussement piano et des images feutrées, mais qui sait frapper juste et fort quand il le faut, et qui m’a rappelé à quel point j’adore le thème “les enfants des autres” (depuis, notamment, le visionnage des Enfants des autres de Rebecca Zlotowski il y a déjà trois ans). Et puis, Les enfants vont bien, c’est aussi le dream trio du cinéma francophone : Juliette Armanet, Monia Chokri et Camille Cottin, dont la présence infuse chaque image avec une pudeur désarmante. On prend les mêmes et on recommence ?
5. Ceci n’est qu’un au-revoir de Guillaume Brac

Guillaume Brac a une place très spéciale dans mon cœur depuis que j’ai découvert son documentaire L’Île au trésor il y a quelques années, et c’est toujours un petit miracle pour moi de visionner un de ses films. Après un détour (si réussi !) par la fiction dans À l’abordage -qui reste sans aucun doute l’un de mes films préférés de ces dernières années, le cinéaste renoue avec la réalité et s’attaque cette-fois ci à un sujet dont j’aimerais qu’on parle bien plus au cinéma : les amitiés adolescentes. Comme toujours, Brac sait poser sa caméra là où il faut et adopter la bonne distance, entre la pudeur et une émotion qui vous prend à la gorge. C’est solaire, c’est doux, ça vous donnera envie de décrocher votre téléphone pour proposer un verre à votre pote du lycée que vous n’avez pas vu depuis dix ans (faites-le !) et de prendre soin de vos ami.e.s plus que jamais.
4. Le Rendez-vous de l’été de Valentine Cadic

Découvert au détour d’une projo presse en plein été pour vous parler des héroïnes estivales au cinéma, mon visionnage du premier film de Valentine Cadic a été un vrai coup de foudre, et ce, malgré le fait qu’il parle d’un événement qui m’a laissée complètement de marbre (les JO à Paris). Mais j’adore les histoires à l’émotion contenue et aux personnages un peu maladroits, et le parcours de Blandine, une trentenaire douce et un peu effacée qui tente de se créer une aventure rien qu’à elle et de renouer avec sa sœur, m’a émue. Le duo d’actrices Blandine Madec-India Hair fonctionne super bien et m’a beaucoup fait rire ; j’ai trouvé son écriture aussi juste que libératrice, et j’ai pris le film comme une leçon de lâcher prise et de confiance en soi. Je crois qu’on a besoin de ces personnages féminins un peu underwhelming, qui semblent ordinaires et non-cinématographiques à première vue, mais qui renferment en fait de vrais trésors nécessaires pour apprendre à vivre. J’ai hâte de voir ce que Valentine Cadic nous réserve pour la suite.
3. Fantôme Utile de Ratchapoom Boonbunchachoke

Je n’avais pas prévu de passer mon année 2025 à vous bassiner avec ce film (dont j’ai déjà parlé dans une vidéo et dans un post sur les films de fantômes), mais qu’y puis-je ? C’est une oeuvre qui coche toutes les cases de mon coeur : la hantise, le film de genre, le cinéma queer et le kitsch. Je l’ai dit et redit, mais je vais le répéter encore : quel trésor d’inventivité et de drôlerie que ce petit ovni, à mi-chemin entre le fantastique et le militantisme ! Ratchapoom Boonbunchachoke, qui, selon ses propres mots, prône l’amour du “silliness” (la fantaisie un peu bête), est un cinéaste d’une rare virtuosité, qui arrive à passer du drame à l’humour en un battement de cil, et à lier politique et intime avec une habileté inédite. Cette année, c’est votre seule chance de voir tout à la fois un fantôme dans un aspirateur, un manifeste contre les thérapies de conversion et une fable sur l’Histoire. Je vous laisse avec une interview du réalisateur que j’adore et qui, je l’espère, vous fera aimer son film autant que moi.
2. Des preuves d’amour d’Alice Douard

Quelle tempête ! Le film d’Alice Douard, a bien des égards, nous bouscule sans ménagement, à l’image d’une grossesse qui chamboule la vie de futurs parents. Ça chiale, ça claque des portes, ça s’embrasse, ça court vite dans les rues de Paris, le tonnerre gronde et les basses des boîtes de nuit pulsent… Mais entre deux rushs, les questionnements des Preuves d’amour touchent juste et mettent en lumière des sujets qu’on ne voit jamais au cinéma : le combat de la maternité lesbienne, les déboires d’un couple à l’aube de la parentalité, l’apprentissage continu de ce que c’est que d’être mère. Les trois actrices principales sont formidables, aussi bien le tandem Ella Rumpf-Monia Chokri, couple aussi réaliste qu’attachant, que Noémie Llovsky, royale dans ce rôle de mère absente et imparfaite. C’est beau, c’est joyeux, on en redemande.
1. Partir un jour d’Amélie Bonnin

J’ai plaisanté toute l’année en disant qu’aucun film ne pourrait supplanter Partir un jour dans mon coeur en 2025 (j’ai pleuré en le découvrant lors de mon premier jour à Cannes), et le fait est que, malgré ma recherche acharnée de quelque chose d’aussi fort, d’aussi bouleversant et d’aussi original, aucun n’a réussi. Que dire qui n’a pas déjà été dit sur le merveilleux film musical d’Amélie Bonnin ? Qu’il est aussi drôle que touchant ? Que Juliette Armanet et Bastien Bouillon ont une alchimie que les plus grandes romcoms de notre époque ont tenté en vain d’émuler ? Qu’Amélie Bonnin a donné un nouveau sens à l’expression “cinéma français” ?
Dalida et Axelle Reed au coude à coude dans la cuisine d’un restaurant routier, la difficile question du transfuge de classe, celle encore plus épineuse du pardon à ses parents… C’est peut-être mon côté bobo culturellement omnivore, mais je pourrais écrire des paragraphes entiers sur le plaisir presque physique que ça a été de voir et de revoir ce film tout au long de l’année. Au fond, à quoi ça sert le cinéma, si ça ne nous donne pas envie de courir vite en chantant très fort et de vivre un peu plus intensément aux côtés des gens qu’on aime ? Je vous laisse, j’ai une poussière dans l’œil.
Mention spéciale aussi à : La Petite Dernière de Hafsia Herzi, Mickey 17 de Bong-Joon Ho, L’Âme Idéale d’Alice Vial, Oh Canada de Paul Schrader et La Chambre d’À côté de Pedro Almodovar.
Je voulais voir mais j’ai raté : I Used To Be Funny d’Ally Pankiw, la trilogie d’Oslo de Dag Johan Haugerud , Deux Soeurs de Mike Leigh, L’attachement de Carine Tardieu, Silver Star de Ruben Amar et Lola Bessis…
Mes albums préférés de 2025
10. For Melancholy Brunettes (& sad women) de Japanese Breakfast

Lola Tung disait de cet album que son premier titre donnait l’impression “d’une vague de fleurs de cerisiers”, et c’est vrai. Cette année, j’ai découvert et adoré la musique de Japanese Breakfast, à la fois grâce à ce joli album très abouti et imagé (la référence au personnage d’Orlando dans le livre de Virginia Woolf puis le film de Sally Potter !!! Taste) et au film Materialists, pour lequel le groupe a composé une chanson de rock ethéré et désinvolte.
Mon morceau préféré : “Little Girl”
9. Double Infinity de Big Thief

Double Infinity n’est pas mon album préféré de Big Thief mais je me suis quand même laissée porter par les questionnements philosophiques et dévastateurs d’Adrienne Lenker (dont l’album solo était dans mon top aussi l’an dernier). Sa musique, seule ou en groupe, est ce qui se rapproche le plus de la poésie à mes yeux, et elle a une façon unique de convoquer le quotidien pour le rendre magique et porteur de révélations intenses. Et puis il fallait oser commencer une chanson par “All night, all day/I could go down on you”.
Mon morceau préféré : “All Night All Day”
8. Everybody Screams de Florence + The Machine

Je ne suis pas la plus fervente auditrice de Florence + The Machine (même si How Big, How Blue, How Beautiful a une place spéciale dans mon coeur) mais j’ai adoré me perdre dans la forêt ensorcelée et le sabbat de cet album qui n’a juste : pas votre temps. A ce stade, ce n’est plus des piques que Florence envoie à l’industrie de la musique et à son sexisme, ce sont des troncs d’arbre (et c’était si rafraîchissant…). A la sixième écoute, j’ai fini par réaliser que c’était tout ce que j’espérais que The Life of a Showgirl de Taylor Swift soit mais n’a pas réussi à être. Florilège de mes paroles préférées : “It must be nice to be a man and make boring music just because you can”, “I fall in love with everyone I meet for ten minutes at least/Then comes the work, the resentments, and the hurt” et évidemment, “You see yourself hung on the wall, but that song is not about you”.
Mon morceau préféré : “Perfume and Milk”
7. SWAG de Justin Bieber

Mettez-ça sur le compte de la nostalgie des années 2010, mais j’ai tout simplement adoré l’album de Justin Bieber, que j’ai écouté en boucle cet été. Je parlais assez longuement de mon soulagement de voir que, même si à certains égards, Bieber est une pop star pas toujours maline dans ses déclarations et ses choix (qui se rappelle la photo de Gaza générée par IA…), j’étais soulagée de voir qu’il était 1) encore en vie 2) plutôt en bonne santé, après toutes les vicissitudes de ses débuts en tant qu’idole des jeunes. Cette année, il a rompu tout lien avec Scooter Braun, son ancien manager, et son dernier album témoigne d’un certain tournant dans sa carrière. Finies les grosses instrus de pop criarde, coucou les collabs avec des artistes de goût (Dijon et Daniel Caesar à la production, quel délice). On y retrouve toute la suavité de ses jeunes années, sublimée par une force tranquille qui lui va bien. Aurait-il enfin trouvé la paix ?
Mon morceau préféré : “THINGS YOU DO”
6. Forever is a Feeling de Lucy Dacus

Slow burn dans mon cœur, l’album de Lucy Dacus s’est peu à peu imposé comme une évidence à coups de petites aphories dévastatrices. La chanteuse ses couple mélodies folks mélancoliques à des questions absolument terribles (exemple : “Why do I feel alive when I’m behaving my worst?). C’est un album doux-amer sur la fin imminente d’une relation, sur le chagrin que cette rupture est sur le point de charrier et sur le deuil de la vie qu’on avait imaginé à deux. Au milieu de cette tempête émotionnelle, Lucy Dacus réussit quand même à ménager de vraies belles déclarations d’amour, via des formules qui, selon moi, veulent dire cent fois plus de choses que de simples “je t’aime” : ma préférée est de dire à la personne que l’on aime ou que l’on a aimée “You’re a big deal”, et puis presque toute la chanson “Best Bet” :“I love your body/I love your mind/They will change/So will mine/But you are/My best guess at the future/You are my best guess/If I were a gambling man, and I am/You’d be my best bet”.
Mon morceau préféré : “Big Deal”
5. Virgin de Lorde

Virgin était probablement l’album de Lorde que j’ai le moins aimé de sa discographie (en même temps, je ne suis pas sûre que je puisse vraiment réexpérimenter l’espèce de mono-maniaquerie adolescente qui s’est emparée de moi à la sortie de Melodrama ou de Pure Heroine), mais comme iel est très fort.e, même ses projets mineurs restent excellents, et je ne comprends pas les gens qui parlent de disque raté. Comme toujours, Lorde n’hésite pas à aller chercher très loin en iel, et livre disque particulièrement charnel et particulièrement unhinged.
J’ai adoré l’audace de certaines paroles (“You tasted my underwear/I knew we were fucked” ou “He spit in my mouth like/He’s saying a prayer”) et qui reflètent bien la folie qu’on peut ressentir au début d’une situationship, mais aussi toute la vulnérabilité dont Lorde fait preuve en expliquant se chercher à la fois comme artiste (mention spéciale à “Favorite Daughter” sur sa relation avec ses fans, son baromètre de succès ultime : “everywhere I run/I’m always running to you” chante-t-iel) et comme adulte (“Wide hips, soft lips, my mama’s trauma/Since ’96, been looking for a grown woman”). Comme toujours, c’est chouette de pouvoir vivre en l’écoutant.
Mon morceau préféré : “Current Affairs”
4. Man’s best friend de Sabrina Carpenter

Je sais que j’ai passé beaucoup de temps à critiquer la DA de cet album, et je n’ai toujours pas changé d’avis concernant la catastrophe que constitue sa pochette, mais il faut se rendre à l’évidence : le reste de l’album est très bon. Évidemment, ce n’est pas la réflexion satirique sur l’hétérocompulsivité qu’on espérait avec un tel titre, mais on y sent quand même la lassitude hargneuse d’une twenty something qui porte son coeur en bandoulière pointer. Les productions sont vraiment super abouties (insérer le tweet “Jack Antonoff, I owe you an apology”) et Sabrina y déploie des trésors d’humour et d’inventivité. La façon dont elle passe sans effort de la country au RNB un peu groovy, avant de conclure sur un titre hommage à ABBA, témoigne de sa grande virtuosité en tant qu’artiste, et honnêtement, tous les sons sont des bangers (mon seul skip : “We Almost Broke Up Last Night”, qui atteste d’un certain déclin en termes de ballades déprimantes. Mais bon, on ne peut pas tout avoir).
Mon morceau préféré : dur de choisir, mais je dirais “Sugar Talking”
3. Eusexua de FKA Twigs

Difficile de faire plus inventif et audacieux que le travail de FKA Twigs, reine de l’innovation et de l’avant-gardisme. Eusexua est un projet très abouti, qui rend hommage à la culture club mais aussi à des sonorités presque cyber-punk. Si les années 90 avaient dû imaginer un disque pour représenter leur vision du futur en 2020, il aurait probablement ressemblé à ça : poli et acéré comme un diamant, expansif, entêtant, assuré. It’s giving opéra futuriste, transformation des magical girls dans les animés, voyage temporel. FKA Twigs en personne disait “Eusexua is for the girls who find their true selves under a hard metal silver stiletto on the damp rave floor” et c’est exactement ça : se regarder dans le miroir juste avant d’aller danser, se sentir à sa place, n’avoir plus rien à perdre.
Mon morceau préféré : hyperfixation sur trois titres que je ne peux départager, “Girl Feel Good”, “Drums of Death” et “Striptease”.
2. Who’s the clown ? d’Audrey Hobert

Petit album discret mais efficace, Who’s the clown ? a gravi les échelons de mon coeur l’air de rien, au point de devenir tout simplement l’un des albums que j’ai le plus écouté cette année. Audrey Hobert est surtout connue pour co-écrire les chansons de sa bestie, Gracie Abrams, et en écoutant son projet solo, je me suis dit qu’il était vraiment grand temps qu’elle sorte de l’ombre de sa bff nepobaby pour voler de ses propres ailes, parce que : quel talent !
Outre un sens indéniable pour les mélodies catchy (“Sue Me” est probablement l’une des meilleures chansons pop que j’ai entendue depuis longtemps), Audrey Hobert a aussi une façon bien à elle de jouer avec la figure de la pop star en devenir. J’adore sa façon d’écrire, à la fois pleine de verve et de fragilité (un équilibre qu’on retrouve aussi sur les chansons de Gracie, hum hum) ; on a est à deux doigts de l’egotrip, mais il faut du courage pour faire preuve d’autant de vulnérabilité, et si je devais résumer Who’s The Clown ? en un mot, je choisirai probablement “unapologetic”, à l’image de la persona qu’une jeune femme de vingt-six ans vivant seule dans une grande ville doit incarner si elle veut devenir quelqu’un.
D’ailleurs, ça veut dire quoi, devenir quelqu’un ? C’est un peu la question qu’Audrey se pose tout au long du disque, alternant entre l’auto-dépréciation apaisée (“I think I’ve got a fucked up face/And that thought used to haunt me/’Til I fell in its sweet embrace/Now I don’t sweat the acne/It’s a bitch but it goes away”) et la confiance en soi façon fake it ‘til you make it (“So wrong to think everyone loves me/And they need to be around me all the time”). Grande réflexion sur la célébrité, Who’s The Clown ? livre en fait un commentaire assez acéré sur la notion de stardom, avec laquelle Audrey Hobert est très clairement en prise. Entre deux, elle n’hésite pas à envoyer de vraies piques aux hommes dont elle et ses amies ne peuvent se passer (“I used to be so super cool/But then I got that thing and you changed me/Now all I ever think’s ‘would you date me?' »). Pour traverser tout ça, Audrey s’aide d’une myriade de figures que j’aime, allant de Carrie de Sex and The City à Phoebe dans Friends (la chanson éponyme qu’elle lui consacre est sans doute plus belle déclaration d’amour que l’on puisse faire à ce personnage), bouclant ainsi la boucle de la pop culture, un vortex infini où l’ego féminin s’écrase et se recompose en vagues incessantes. Peut-être que c’est ça, devenir adulte.
Mon morceau préféré : impossible de choisir entre “Phoebe”, la ballade de rupture “Don’t go back to his ass” et “Shooting Star”.
1. choke enough d’Oklou

C’est simple, cet album relève du divin. J’ai déjà écrit un très, très long texte sur mon amour pour choke enough en février, alors je vous laisse vous y référer si ça vous intéresse, parce que je ne crois pas pouvoir écrire un mot de plus sur ce disque sans le canoniser et lui élever un petit autel dans ma chambre. Quelle joie de pouvoir courir dans les couloirs du métro parisien en écoutant “family and friends” et de pouvoir danser sur “harvest sky” ; quelle chance de pouvoir se laisser porter par les premières notes de “choke enough” sur le périph, très très vite ; quel privilège d’être née à l’époque où a été composé « blade bird », qui, comme le disait The Fader, est peut-être la meilleure chanson de l’année. Les trompettes d’Oklou résonnent à nouveau, et pour toujours dans mon âme.
Mon morceau préféré : “family and friends”
Mention spéciale aussi à : The Art of Loving d’Olivia Dean, Dog Eared de Billie Marten, LUX de Rosalía, I quit de HAIM et Addison d’Addison Rae.
Et vous, c’était quoi vos films et albums préférés de cette année ?